Gros plan sur…

L’INSPE, l’école des professeurs d’école

Ecole normale, IUFM, ESPE, et aujourd’hui INSPE (Institut national supérieur du professorat et de l’éducation). Les étiquettes changent, les feuilles de route aussi au gré des ministères, mais l’esprit ne varie pas : former des professeurs d’école. Sur le site de Nevers, en lisière du Banlay, près de 200 étudiants en licence et master apprennent à enseigner. Un art délicat et fondamental qui a lui aussi évolué.

Au début du XXe siècle, l’écrivain Charles Péguy en faisait ❝ le plus beau métier du monde, après le métier de parent (et c’est d’ailleurs c’est le plus apparenté au métier de parent) ❞, ex aequo avec celui de professeur de lycée. Films et feuilletons ont, depuis, enrichi la légende du maître d’école et de l’instit.

Responsable depuis huit ans du site de Nevers de l’INSPE (Institut national supérieur du professorat et de l’éducation) de Bourgogne, Nathalie Pinsard voit encore arriver chaque année des étudiants portés par l’idéal de l’enseignement. Le cursus est un atterrissage plus ou moins rude sur le tarmac des professeurs des écoles : ❝ Les conditions d’exercice ont beaucoup changé. La charge de travail est énorme, d’ailleurs, on n’entend plus de gens dire « on vient pour les vacances scolaires ❞. Les étudiants réalisent qu’apprendre est devenu quelque chose de compliqué, fastidieux, qui prend du temps ; de plus en plus d’enfants n’acceptent pas le sens de l’effort. L’école n’est plus toujours perçue comme un élément d’émancipation. »

A cette complexité croissante du métier s’ajoute la question de la rémunération : ❝ Elle devient une matière à réflexion sérieuse. Commencer à 1 500 € avec un bac + 5, ce n’est pas évident. C’est pour cela qu’on recrute moins de scientifiques que de littéraires. ❞ Malgré cette réalité, dépeinte sans fard par Nathalie Pinsard, le métier reste attractif, et pas seulement chez les jeunes : ❝ En master 1 et 2, nous avons beaucoup de personnes en reconversion, qui peuvent représenter jusqu’à un tiers de l’effectif. Ce sont des gens qui ont passé une dizaine d’années dans un travail, dont les enfants sont grands, et qui veulent reprendre des études. C’est une diversité enrichissante pour le métier, et ce sont des reconversions souvent réussies, car elles sont réfléchies.

Les personnes souhaitant entrer dans cette formation doivent être curieuses…

En vingt ans à Nevers, Nathalie Pinsard a vu valser les étiquettes et les réformes, plus ou (surtout) moins heureuses. Les anciens qui ont connu les Ecoles normales (créées au XIXe siècle) ont dû s’habituer au tourbillon des sigles : IUFM (Institut universitaire de formation des maîtres) en 1989, ESPE (Ecole supérieure du professorat et de l’éducation) en 2013, INSPE en 2018. ❝ Chaque changement de statut s’est traduit par un renforcement du pilotage sur la façon dont on forme les professeurs. Jusqu’aux IUFM, les écoles étaient autonomes et indépendantes. Nous sommes désormais sous la responsabilité du ministère de l’Education nationale, et plus celui de l’Enseignement supérieur. Cela nous donne beaucoup moins d’autonomie.

Empreintes de chaque nouveau ministre, les réformes sont guettées avec appréhension sur le terrain : ❝ Au fur et à mesure des réformes, on perd du temps de formation. Nous étions à 1 000 heures sur deux ans au début de ma carrière à Nevers ; la dernière réforme propose un volume de formation de 800 heures en conformité avec les textes européens. Avec la déclinaison pour la France d’un volume de formation dédié pour moitié aux maths et au français. Alors qu’on peut accrocher les élèves avec d’autres matières. La polyvalence, c’est la richesse de l’école élémentaire.

Les matières jugées moins fondamentales ont déjà été soumises au régime sec au fil des ans : ❝ A l’époque de l’IUFM, et jusqu’en 2013 environ, les étudiants de M2 avaient 25 heures de SVT par an, et autant en sciences physiques. Maintenant, c’est six heures. ❞ Ce qui n’empêche pas l’INSPE de continuer à  rechercher les profils polyvalents  : ❝ Les personnes qui souhaitant entrer dans cette formation doivent être curieuses, et de niveau convenable dans tous les domaines d’enseignement de l’école primaire.

Plusieurs voies après la L3

En troisième et dernière année de licence EFEC (Enseignement, formation, éducation et culture), les étudiants du site INSPE de Nevers ont le choix : poursuivre en master MEEF (Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation) pour devenir professeurs des écoles (MEEF 1er degré) ou conseiller principal d’éducation (MEEF Encadrement éducatif), ou bifurquer hors de l’Education nationale vers un master d’ingénierie de la formation ou de la culture. La licence EFEC permet aussi de passer les concours de la fonction publique de catégorie B.

De Varzy à Nevers

L’Ecole normale mixte de la Nièvre a ouvert au Banlay, boulevard Saint-Exupéry, en 1960. Elle est l’héritière de l’Ecole normale d’instituteurs, implantée à Varzy de 1861 à 1941, et de l’Ecole normale d’institutrices, qui a fonctionné à Nevers de 1883 à 1939. Les bâtiments appartiennent au Conseil départemental, qui en assume l’entretien. Les étudiants ont accès aux équipements suivants : huit salles de cours, amphithéâtre, salles de musique, sciences et arts visuels, salles d’informatique, de visioconférence, bibliothèque, gymnase et foyer.

Le site abrite une résidence étudiante de 18 chambres, louées à la nuitée, à la semaine ou au mois. Le restaurant universitaire (RU) d’une capacité de 160 places est ouvert les midis. Son fonctionnement représente « un point noir », selon Nathalie Pinsard : « Nous avons eu jusqu’à 300 couverts par jour et nous avions deux cuisiniers. Actuellement, en raison de la situation sanitaire et de la lourdeur des protocoles, et de la vétusté d’une partie du matériel, le fonctionnement du restaurant est de plus en plus difficile. »

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